Le double jeu russe avec l’Iran
Au début de cette semaine, les ministres russe et iranien de l’énergie ont signé conjointement une feuille de route destinée à développer des partenariats stratégiques entre les deux pays, notamment en ce qui concerne l’exploitation par les « majors » russes (Loukoil, Rosneft, etc.) de gisements énergétiques iraniens. Les accords prévoient également le transfert d’essence stratégique, pour approvisionner en essence les intérêts iraniens. Voilà donc la coopération énergétique entre ces deux puissances relancée.
Cependant, dans le même temps, la Russie doit se conformer aux dernières sanctions internationales contre l’Iran, décidées en juin dernier, rendant pratiquement caduques ces derniers accords de partenariat. Les milliards de dollars investis par les sociétés russes n’arriveront donc probablement jamais en Iran. La Russie tente donc de contourner ces sanctions afin de maintenir un partenariat stratégique avec ce pays dont le poids (économique, politique) n’est pas à négliger. Mais la Russie reste sous la surveillance des puissances occidentales, car elle est soupçonnée de fournir les plans d’une future centrale nucléaire à l’Iran (située à Bouchehr, dans le Sud-Ouest du pays).
Néanmoins, c’est bien à un double jeu auquel nous avons affaire. Dmitri Medvedev, le président russe vient en effet de déclarer que l’Iran était « proche d’avoir le potentiel qui, en principe, peut être utilisé pour créer une arme nucléaire ». Une déclaration alarmiste ? Réaliste ? Probablement les deux. D’un côté, la Russie tente donc d’amadouer à tout prix l’Iran par le biais d’accords. D’un autre côté, elle suit les avis de la communauté internationale afin de ne pas en être marginalisée. Au risque de tout perdre, probablement. Mais les conservateurs russes ne sont pas tombés sur la tête pour autant. La Russie a beau critiquer la politique iranienne, sa diplomatie, les intérêts économiques n’en restent pas moins importants.
Il y a donc le discours officiel, relayé par Medvedev et consorts, sur la dangerosité du régime des mollahs, et le discours officieux, le plus dangereux, où la Russie est consciente de la nécessité de garder, malgré tout, de bonnes relations avec l’une des premières puissances gazières au monde. En tout cas, voilà un sujet qui pourrait bien permettre à la Russie de redorer son blason sur la scène internationale, elle qui paie encore les conséquences politiques d’une transition ratée.